• Interview de Claire Alet, journaliste à "Alternatives économiques"

    Dans le cadre d'un Blog sur la mixité professionnelle, nous pensions qu'il serait intéressant d'avoir l'avis d'un ou d'une spécialiste. Nous avons donc contacté Madame Claire Alet, journaliste à Alternatives économiques, qui a gentiment accepté de nous répondre... Interview :


    Bonjour Claire Alet, tout d’abord, qu’est-ce qui vous a poussé à vous intéresser à la mixité professionnelle ? des expériences professionnelles vécues ?

    Bonjour, j’ai effectivement constaté une forte inégalité entre les femmes et les hommes au travail.
    A la sortie de mes études, j’ai été confrontée au sexisme et aux stéréotypes de genre dans ma vie professionnelle.
    Par exemple, il y a quelques années, les organisateurs d’un colloque ont refusé que j’en fasse l’animation parce que je suis une femme. En effet, ils ont affirmé qu’ils préféraient un animateur masculin au prétexte que cette rencontre serait « l’occasion de prises de décisions importantes ». C’est très déstabilisant.
    Aussi, de manière générale, nous pouvons observer que sur le marché de l’emploi, il y a encore 27% d’écart entre les salaires des hommes et des femmes. Aussi, 80% des emplois précaires et à temps partiel sont occupés par des femmes.

     Pour quelles raisons avez-vous créé un blog sur la mixité professionnelle ?

    C’est assez récent, puisque j’ai créé ce blog en juin 2013. Je souhaite y apporter le regard d’une journaliste féministe, et donner des informations sur les avancées ou les non avancées sur la mixité, la parité et l’égalité.

    Quels types de commentaires avez-vous eu sur votre blog ou sur votre twitter ? Avez-vous observé une évolution depuis la création de votre blog ?

    La création de mon Blog étant assez récente, je n’ai pas encore eu beaucoup de commentaires. En revanche, j’ai été confrontée par mails à des lecteurs mécontents, voire  violents dans leurs propos.
    Certains hommes, souvent appelés « masculinistes », craignent la montée du féminisme, car à leurs yeux, il viendrait rogner leur pouvoir et leur place dans la société.

    Dans les trois secteurs suivants : industriels, scientifiques et numériques et dans le monde du travail en général : Peut-on parler d’une évolution positive, concernant l’avancée de la mixité professionnelle, ces dix dernières années ?

    Oui, il y a une évolution positive car la mixité grandit peu à peu. Aujourd’hui, on compte 27% de jeunes filles en écoles d’ingénieurs alors qu’elles n’étaient que 6 % dans les années 1980, et 30% en prépa scientifique. De plus, en moyenne, les femmes sont plus qualifiées que les hommes et investissent donc le marché du travail par le haut, notamment dans la recherche industrielle, l’informatique ou encore la télécommunication.

    Hormis le hors/série d’Alternatives économiques de septembre 2013, connaissez-vous des livres et/ou des auteurs en pointe sur le sujet ?

    Oui, on peut citer les chercheuses Monique Méron et Margaret Maruani. Elles ont publié un ouvrage en commun « Un siècle de travail des femmes en France 1901-2011 ».

    Brigitte Grésy, Secrétaire Générale du Conseil supérieur de l’égalité professionnel,  qui a participé au hors-série d’ Alternatives économiques, a de son côté écrit un ouvrage intitulé «Petit traité contre le sexisme ordinaire». Des chercheuses de l’Ined ont aussi publié récemment une étude sur les discriminations à l’embauche selon le sexe. Les études et les recherches sur les inégalités entre les femmes et les hommes se multiplient et c’est une bonne nouvelle.

    N’avez-vous pas peur que l’aggravation de la crise économique ne remette en cause les avancées concernant la mixité professionnelle H/F ?

    C’est une bonne question, et certains patrons peuvent ne pas s’en soucier.
    C’est dommage parce que des études de l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Economique) démontrent que si le taux d’activité des femmes était le même que celui des hommes en 2030, nous aurions un PIB augmenté de 0,5 % en France.

    On a tous à gagner à vivre dans une société plus juste. Cela diminuerait des situations de tension et de violence.

    Selon vous, est-ce que la législation pourrait favoriser l’égalité H/F ?  Si oui, quel type de loi vous semblerait intéressant ?

    En effet, la législation a son rôle à jouer, et il y a déjà au moins six lois sur l’égalité professionnelle. L’égalité entre femmes et hommes est aussi inscrite dans la Constitution. Le problème est plus dans l’application de ces lois et dans leur contrôle. Des efforts récents ont été faits dans ce sens : Fin 2012, un décret a renforcé le contrôle des entreprises et surtout prévu des sanctions à l’égard de celles qui ne respecteraient pas la législation. Ainsi, près de quatre cents mises en demeure et deux sanctions financières ont eu lieu depuis l’application de ce décret. La législation peut donc être efficace à condition qu’elle prévoit des sanctions et des moyens suffisants pour contrôler son application.

    Voyez-vous une différence entre la France et les autres pays sur ce sujet ? Si oui, quels pays sont, selon-vous, les plus avancés sur la mixité ?

    Oui, il y a des différences au sein de l’Union Européenne, et la France se trouve dans la moyenne sur ces questions.
    Dans les pays nordiques, nous constatons moins d’inégalités entre les femmes et les hommes, notamment sur les salaires. Cependant, en Suède, en Norvège ou bien en Finlande, les femmes restent confinées à certains secteurs professionnels, et occupent l’essentiel des temps partiels.

     

    Nous remercions vivement Claire Alet d'avoir pris du temps avec nous pour cette interview, et nous vous conseillons de vous rendre sur son Blog http://alternatives-economiques.fr/blogs/clairealet/ .

     

     

    Le groupe Elan's,

     

     

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  • Commentaires

    1
    Elodie
    Mardi 10 Décembre 2013 à 13:04

    Bonjour,


    Je vous félicite pour la qualité de cet article, très professionnel et très intéressant. Quel chance d'avoir pu interviewer Claire ALET (elle est sympa?). Je n'aurais pas pensé que l'on puisse refuser l'animation d'un colloque à une femme sous prétexte qu'il y a des décisions importantes à prendre! La honte!Je vous souhaite une bonne fin de formation et bon vent pour la suite.


    Elodie


     



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